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Sauver les vies des mères et des nouveau-nés dans les plantations de thé du Bangladesh

Anjana se repose aux côtés de son nouveau-né à Moulvibazar au Bangladesh. L’enfant et sa mère ont tous les deux survécu à une dystocie grâce à l’intervention d’une sage-femme. © CIPRB/Animesh Biswas
  • 11 Juillet 2017

MOULVIBAZAR, Bangladesh – Lorsqu’Anjana, 20 ans, a ressenti les premières douleurs de l’accouchement, elle n’avait aucune idée que sa vie était en danger. Elle était alors enceinte de 36 semaines et c’était sa première grossesse. Un jour entier s’était écoulé avant que sa famille ne fasse appel à la sage-femme. Elle a souffert d’une dystocie - complication potentiellement fatale au bébé et à la mère. 

Ce jour-là, Anjana a eu de la chance.

Un programme médical, lancé récemment par l’UNFPA et principalement destiné aux travailleuses des plantations de thé de la région de Moulvibazar, donne désormais accès aux prestations de sages-femmes, aux soins prénatals ainsi qu’à un suivi de l’accouchement afin de réduire les risques de complications.

« Je ne réalisais pas, lorsque j’étais en plein travail s'il y avait un problème », se rappelle Anjana.

Une plantation de thé à Moulvibazar. Les ouvriers dans les plantations de thé sont en majorité des femmes, ces travailleuses représentant la couche la plus pauvre et la plus marginalisée de la population bangladeshie. © Sujitpauldu/Wikimedia Commons/CC BY-SA 4.0

Selon elle, la sage-femme lui a sauvé la vie en l'envoyant d'urgence au complexe de santé Kamalganj. « Elle a tout arrangé pour moi. Lorsque les médecins ont mis l'enfant au monde, ils ont dit que si j'avais retardé mon arrivée à l'hôpital, mon bébé serait mort. »

Cibler les personnes les plus à risque

Les travailleurs des plantations de thé au Bangladesh sont en majorité des femmes, faisant pour la plupart parties des communautés les plus marginalisées et les plus appauvries du pays. Ces artisanes des cultures de thé bangladeshies sont aussi parmi les plus touchées par la mortalité maternelle. D’après un rapport national de 2014, les plantations de thé et leurs alentours représentent environ 40 pour cent des régions affectées par les décès maternels.

Plusieurs raisons se cachent derrière ce taux élevé de mortalité à l’accouchement pour ces ouvrières. La distance entre les plantations et les centres médicaux en est une. Plus encore, les peurs répandues au sein des travailleuses – l’anxiété à l’idée de perdre leur emploi du fait de leur grossesse et de leur futur statut de mère – incitent beaucoup de femmes à garder leur grossesse secrète et à renoncer aux soins prénatals.  

En février 2016, l’UNFPA en collaboration avec le Centre for Injury Prevention and Research (Centre de prévention des blessures et de la recherche), le gouvernement bangladeshi et les autorités des plantations de thé, ont lancé un programme de soins de santé, supervisé par des sages-femmes, dans cinq plantations pilotes. Cinq sages-femmes furent ainsi recrutés afin de répondre aux besoins de la communauté sur place.

« Je suis chargée d’administrer des soins prénatals de qualité, des services sûrs de suivi de l’accouchement ainsi que des soins postpartum », explique Sabana Begum, une des sages-femmes.

Ses collègues et elle assurent les soins aux dispensaires gérés par les autorités locales en charge des plantations et visitent également les patientes à domicile. Les sages-femmes informent les hôpitaux à proximité, où du personnel hospitalier est formé par l’UNFPA, d’éventuelles complications liées à la grossesse des patientes.

Une sage-femme ausculte une patiente au dispensaire. © CIPRB/Animesh Biswas

Convaincre les femmes de se faire aider

Sabana ajoute qu’une partie significative de son travail consiste à convaincre les ouvrières des plantations de se faire suivre médicalement. « Les mères de famille dans ces plantations de thé sont encore à la traîne en ce qui concerne les soins de santé liés à la maternité », affirme-t-elle, expliquant que la majorité d’entre elles préfèrent accoucher à la maison.

Sabana se bat également contre les idées préconçues et potentiellement dangereuses sur la grossesse comme le fait d’éviter les aliments trop riches afin d’avoir un accouchement moins difficile. D’autres coutumes disent qu’il faudrait coucher les nouveau-nés à même le sol et que les mères devraient rester confinées chez elles après l’accouchement. 

Même si Sabana ne fait pas partie de la communauté des ouvrières du thé au Bangladesh, elle a toutefois conscience des dangers que de tels comportements peuvent engendrer au sein d’une famille.

« Quand j’étais enfant, raconte-t-elle, j’ai perdu mon unique petit frère. L’accouchement s’était fait à la maison, avec l’aide de membres de la famille. Ils lui ont donné le bain directement après sa naissance. » Son petit frère a par la suite contracté une pneumonie et est décédé, à peine âgé de 23 jours.

Administrer un premier bain à un nouveau-né directement après l’accouchement peut accroitre le risque de maladies chez l’enfant. Ce fut le cas avec le petit frère de Sabana.

« Ce jour-là, j’ai décidé d’agir », explique-t-elle, décidant alors qu’elle deviendrait sage-femme.

La mortalité maternelle et périnatale sur le déclin

Entre septembre 2016 et avril 2017, les sages-femmes ont administré des soins prénatals à 450 patientes, 279 nouveau-nés ont également reçu un suivi postnatal. Le programme est désormais étendu à dix plantations de thé, couvrant une population de plus de 55 000 personnes.

Les progrès sont désormais perceptibles. Le taux de décès liés à la maternité, de mort-nés et de morts prénatales est en déclin, selon des premières estimations.

Anjana et son bébé en sont la preuve vivante, une sage-femme ayant intervenue à temps lors de son accouchement.

« C’est grâce à elle que mon bébé et moi sommes en vie aujourd’hui », conclut-elle.  

Traduit de l'anglais par Manon Jacob

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