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Renforcer la confiance et promouvoir les accouchements assistés par du personnel qualifié dans les établissements de santé camerounais
- 02 Octobre 2024
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BANA, Cameroun – Toukam Mirabelle avait été informée que les grossesses gémellaires allaient rarement au-delà de huit mois et demi. Pourtant, la sienne dépassait même son terme normal.
Ses premières contractions se sont manifestées au milieu de la nuit. Les déplacements de nuit étant trop dangereux, elle a été contrainte d’attendre 11 heures que le soleil se lève pour se rendre à l’hôpital de district de Bana.
La région Ouest du Cameroun étant frappée par les crises climatiques et les explosions récurrentes de violence, accéder à n’importe quel type de services de santé peut s’avérer particulièrement difficile, et parfois même mortel.
« Lorsque je suis arrivée à l’hôpital, je ne sentais plus aucune contraction », explique Mme Toukam, du village de Bakassa, à l’UNFPA, l’agence des Nations Unies chargée de la santé sexuelle et reproductive. « J’étais inquiète. »
L’accès à des établissements de santé équipés et dotés en personnel ne peut être assuré dans la région, et les services notamment de planification familiale et de réponse à la violence basée sur le genre souffrent également d’un manque de ressources.
Bien qu’arrivée saine et sauve à l’hôpital, Mme Toukam n’était pourtant pas encore au bout de ses peines : il lui fallait trouver la sage-femme qui lui avait été assignée, Stella Tchiwobe.
« Les infirmières ne parvenaient à entendre qu’un seul battement de cœur, le deuxième semblait trop faible », raconte-t-elle à l’UNFPA. « J’ai appelé Mme Tchiwobe pour m’assurer qu’elle était à mes côtés à ce moment-là, j’avais besoin qu’elle me rassure. »
Du changement dans l’air
D’après les estimations des Nations Unies, les taux de décès maternels au Cameroun sont parmi les plus élevés du monde. Mais à Bana, le Dr Ewane constate que les données contredisent cette tendance. Il travaille à l’hôpital de district de Bana depuis cinq ans et déclare à l’UNFPA : « Nous voyons plus de femmes venant des villages voisins venir pour des consultations prénatales et pour accoucher. Avant, nous recevions environ 10 femmes par mois, maintenant nous en voyons environ 20. »
Cette hausse du recours au service de santé maternelle à l’hôpital est en grande partie le fait d’une femme : Mme Tchiwobe. Elle a pris ses nouvelles fonctions de sage-femme en février 2024 après avoir été recrutée par l’UNFPA, qui travaille avec le conseil municipal de Bana pour former et déployer du personnel de santé dans la région.
« Sa présence est d’une grande aide pour les femmes qui s’occupent des accouchements dans les différents centres de santé », affirme Sanga Jean-Baptist, le maire de Bana. M. Sanga explique que les effectifs de nombreux petits établissements de santé sont principalement constitués d’infirmières, et non de sages-femmes formées, même si au fil du temps elles ont appris à mettre des enfants au monde en cas de besoin.
« Je pense que la présence d’une sage-femme les aidera grandement à perfectionner leurs compétences pour améliorer la prise en charge des accouchements. »
Une professionnelle qui fait toute la différence
« Les problèmes de santé sexuelle et reproductive sont inquiétants, d’autant plus dans un milieu où la tradition est omniprésente », déclare Bob-Iga Emmanual, qui travaille pour le ministère de la Santé à Bana. « Elle a également organisé des conférences éducatives pour les femmes en matière de planification familiale, d’allaitement et de santé maternelle. »
Mme Tchiwobe s’affaire dans le service, s’occupant des femmes enceintes, des nouvelles mamans et des nourrissons. Les patientes et le personnel de l’établissement ont rapidement senti le changement qu’elle a insufflé : deux semaines après avoir pris ses fonctions, Mme Tchiwobe a aidé Mme Toukam à accoucher de ses deux garçons, en toute sécurité.
« C’était la première fois que je rencontrais une sage-femme professionnelle », explique Mme Toukam à l’UNFPA. « Les conseils qu’elle m’a donnés pour prendre soin de moi et de mes bébés étaient tellement instructifs, tellement différents et rassurants. Je me suis vraiment sentie en sécurité et à l’aise avec elle. »
Le poste de Mme Tchiwobe est soutenu par l’UNFPA et financé par le gouvernement du Canada dans le cadre d’un programme d’intervention humanitaire dans le pays.
« C’était mon troisième accouchement », ajoute Mme Toukam, « et personne ne m’avait jamais conseillée comme elle. »
Sauver trois vies à la fois
Mme Tchiwobe est arrivée à temps pour s’occuper de Mme Toukam, mais s’est inquiétée en voyant le bloc opératoire prêt pour une chirurgie. « Ses dernières consultations prénatales n’avaient rien révélé d’inquiétant, alors je l’ai à nouveau examinée et j’ai clairement pu entendre les deux battements de cœur », explique Mme Tchiwobe.
« J’ai dit à mes collègues que la situation pouvait être gérée sans césarienne. Elles m’ont fait confiance et nous avons procédé à l’accouchement. »
Après environ une heure en salle d’accouchement, Mme Toukam a donné naissance à ses deux garçons en pleine santé, Tieumeni et Fomenyi, sans complications.
« Mme Tchiwobe a vraiment été incroyable tout du long. Sans elle, j’aurais été opérée. Je suis tellement heureuse qu’elle ait été là », se réjouit-elle. « Quand j’ai raconté mon histoire aux femmes de mon entourage, plusieurs m’ont dit qu’elles iraient dorénavant à l’hôpital de district de Bana pour leurs consultations prénatales. Elles aussi veulent être prises en charge par elle. »
Des services de santé de première ligne
Outre les accouchements, de plus en plus de femmes se rendent à l’hôpital de district pour y bénéficier d’aide en matière de santé sexuelle et reproductive. Depuis le lancement du programme en 2022, l’UNFPA a recruté 35 sages-femmes qui ont été déployées pour assurer des services de santé reproductive à travers le pays.
L’initiative vise à continuer à militer pour que le gouvernement soutienne entièrement cette profession et lui donne les moyens d’agir afin de mettre un terme aux décès maternels évitables. C’est en dotant le système de santé du plus grand nombre de sages-femmes qu’il sera possible de sauver la vie des femmes et de leurs nouveau-nés au Cameroun.