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En Azerbaïdjan, les hommes s’engagent contre la violence basée sur le genre
- 27 Octobre 2017
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IMISHLI, Azerbaijan –Ces dernières semaines le monde a été témoin d’affaires de violences basées sur le genre très médiatisées et impliquant des personnalités haut placées. Des millions de femmes ont exigé que ce type d’abus prenne fin, et les hommes sont de plus en plus encouragés à s’engager.
Dans les villages isolés du district d’Imishli, en Azerbaïdjan, c’est justement ce qu’ils font.
« Nous sommes là pour ouvrir une nouvelle voie, sans violence et sans ignorance vis-à-vis des violences basées sur le genre », explique Vusal, un jeune homme de 23 ans. Il participe à une initiative soutenue par l’UNFPA qui rassemble les hommes pour mettre fin à la violence, et aux profondes inégalités de genre qui en sont le terreau.
Les violences faites aux femmes et aux jeunes filles sont endémiques, et pourtant souvent considérées comme des affaires privées. Selon un sondage de l’UNFPA datant de 2008, près d’un quart des Azerbaïdjanaises déclarait avoir subi des violences, mais moins d’1 pour cent d’entre elles a demandé l’aide des services publics pour y faire face.
La stigmatisation, la protection juridique insuffisante et le manque de services adaptés font que l’on parle rarement de ces violences. Selon Vusal, la situation est « extrêmement difficile ».
L’initiative, lancée en 2016 par l’UNFPA et financée par l’Agence des Etats-Unis pour le développement international éduque les hommes à mettre fin aux violences basées sur le genre.
« L’un des obstacles majeurs au traitement de la violence conjugale en Azerbaïdjan, c’est que le mari, la famille et la communauté en général ont tendance à rendre la femme responsable dans presque tous les cas », déplore Javid Shahmaliyev, directeur du Centre d’études sociales et psychologiques, qui travaille avec l’UNFPA pour organiser ces sessions d’informations à Aran, Absheron et Lenkoran.
« Même quand les femmes ne sont pas vues comme responsables des violences qu’elles subissent, elles sont perçues comme la force principale qui peut et doit mettre fin au problème, ajoute-t-il. Les hommes ne sont jamais considérés comme le problème, car tout le monde pense que les hommes ne peuvent pas changer ».
Ces hommes-là ont pourtant entrepris de prouver le contraire.
Ce projet réunit de petits groupes d’hommes pour discuter des violences basées sur le genre pour une durée de deux jours.
Ils commencent par explorer la façon dont la rigidité des idées reçues sur les rôles basés sur le genre peut amener à la violence. Une étude de 2006 avait montré que 49 pour cent des femmes et 58 pour cent des hommes en Azerbaïdjan pensaient que les violences conjugales étaient justifiées si les femmes n’étaient pas à la hauteur de certaines attentes.
Ils discutent aussi des diverses sortes de violences – pas seulement physiques, mais aussi psychologiques ou économiques.
Des discussions ont ensuite lieu sur la façon d’intervenir s’ils ont connaissance de violences. Les hommes sont encouragés à défendre les survivantes et à faire en sorte que les responsables soient punis.
Ils débattent aussi de la meilleure façon d’aider les survivantes, notamment en les accompagnant vers des services spécialisés ou des refuges.
Les participants expliquent que ces conversations leur ont ouvert les yeux.
« Au cours de ces sessions d’informations sur les différentes formes de violences basées sur le genre, je me suis peu à peu rendu compte de la violence qui existe au sein de familles que je côtoie de près », dit Ziya, 28 ans.
Sur les six derniers mois, plus de 600 hommes ont pu être sensibilisés via ces sessions.
Certaines sessions sont aussi ouvertes aux femmes, et l’UNFPA travaille également avec le gouvernement pour développer un système efficace pour diriger les survivantes vers les services appropriés (soins médicaux, suivi psychologique, aide juridique).
Les choses évoluent dans le bon sens, selon Ziya.
« Il y a quelques années, même parler de violence dans notre communauté était inenvisageable, pour ne pas compliquer la situation. Aujourd’hui, je sais quoi faire si je vois un homme frapper sa femme ou entraver sa liberté ».
Kamaleddin, 59 ans, est d’accord avec cela. Il s’est proposé pour mettre la cantine qu’il dirige à contribution pour recevoir les sessions d’informations.
« Cela me donne l’impression que je peux peut-être agir pour ma communauté, explique-t-il, parce que l’idée que je ne puisse rien faire pour éliminer la violence basée sur le genre m’est insupportable ».
Traduit de l'anglais par Marie Marchandeau